Un Héritage Normand qui disparaît
1. - Langue
La langue reflète la psychologie d'un peuple, ses institutions, son his~oire, les influences qu'il a subies. Aussi retrouve-t-on dans l'étude des langues à Jersey, car il y en a trois : français, anglais et jersiais, la complexité d'une société originale relativement isolée jusqu'au XIXe siècle et pourtant hospitalière aux réfugiés de tous genres. On y découvre toujours vivantes des formes françaises du XIIIe siècle protégées par l'isolement géographique et humain : du moyen âge en plein XXe siècle.
1. - Le Français
Nous commençons par le français parce qu'il fut jusqu'à ces dernières années la langue officielle des Etats et des cours de justice.
Lors de sa visite en 1921, Georges V répondit à l'adresse de fidélité en français à Jersey, en anglais à Guernesey. Ce français ne diffère du nôtre que par certaines tournures archaïques comme : baillier, (langage courant : donner, vendre ; juridique : vendre), banni aux enchères, septante, nonante, ajour (une semonce).
A plusieurs reprises, on avait déjà tenté de lui adjoindre ou de lui substituer légalement la langue anglaise. Toutes les tentatives avaient été repoussées à forte majorité. Puis quelques entorses ont été faites à la tradition ; il fut permis aux avocats de plaider en anglais. Une motion fut passée aux Etats le 8 février 1900 pour permettre l'usage facultatif de l'anglais ou du français aux Assemblées. La loi qui créa l'impôt sur le revenu fut rédigée en anglais. Plusieurs rapports annuels des Comités furent rédigé en anglais également. Aujourd'hui, l'anglais est la langue officielle.
Ce recul du français comme langue officielle aura peut-être des conséquences plus graves qu'on ne le soupçonne. M. Guidoz écrivait déjà dans la Revue des Deux Mondes de 1889. « Mais que les insulaires s'en rendent compte ou non, cette langue (le français) est le palladium de leurs institutions et de leur indépendance. Le jour où tout sera anglais, les dissidences et les complications de législation frapperont les yeux plus que maintenant ; les anglais tous les jours plus nombreux dans l'île, le supporteront moins patiemment. Ils diront : puisque ce pays est anglais, pourquoi n'a-t-il pas les institutions du reste de l'Angleterre ?... Les Iles deviendront comté anglais et n'auront pas plus d'individualité et d'indépendance que, par exemple, l'île de Wight ».
Comme langue parlée, le français recule de plus en plus devant l'anglais. Falle notait en 1694 que « la bonne société parlait français, tandis que le commun parlait une sorte d'ancien français ». Mais déjà a cette époque, l'anglais était aussi parlé que le français à Saint Hélier, siège de la garnison anglaise.
Il faut d'ailleurs reconnaître que beaucoup d'immigrants français ont contribué à ce recul. Les ouvriers agricoles ou les domestiques de maison qui venaient se placer à Jersey avaient honte de parler leur langue naturelle et la désapprenaient avec une rapidité déconcertante. Leurs enfants ne voulaient plus se servir que de l'anglais. On a observé ce phénomème surtout chez les Bretons, essentiellement malléables. Pourtant aucune pression n'était exercée sur eux. Seule l'influence du milieu et l'action contagieuse de l'entourage suffisaient.
Certains sont allés jusqu'à angliciser leur nom, par exemple Garrett pour Le Hégarat, Brailey pour Le Breuilly.
Il y eut évidemment des exceptions. Nous avons trouvé à Saint Ouen une vieille qui ne savait parler que le breton. A Saint Martin un vieux Français, depuis 51 ans dans l'île, était arrivé à l'âge de 14 ans de Lanvollon (C.-du-N.). Il ne savait pas un mot d'anglais, sa femme non plus. Mais ses enfants parlaient anglais. Un autre, à Saint Sauveur, depuis 53 ans dans l'île, ne savait pas l'anglais.
Les Etats ont voté le 13 février 1895 un règlement encourageant par des subventions l'enseignement de la langue française dans les écoles élémentaires. Nous reviendrons sur ce sujet à propos de l'éducation. Mais il est certain que cette direction des Etats ne reste pas lettre morte. Une grande importance est attribuée à l'étude du français, tant parlé qu'écrit. Les résultats sont évidemment variables.
Dans la campagne, la majorité des enfants parlent bien le français avec leur accent anglais, mais l'écrivent mal. D'autres fournissent des rédactions excellentes que beaucoup d'élèves français des écoles primaires ne pourraient pas égaler pour le style et l'orthographe (1).
En ville, la classe de français n'est plus pour la plupart l'approfondissement de la langue maternelle, mais l'étude d'une langue étrangère et les résultats sont évidemment moins satisfaisants. Les enfants ont encore dans les campagnes l'occasion de parler français avec leurs parents, mais autrement, entre eux, ils emploient toujours l'anglais. Qu'adviendra-t-il dans quelques années lorsqu'ils seront grands ?
II. - L'Anglais
Escard fixait en 1893 comme limite de la population bilingue une diagonale coupant l'île de l'Est-Nord-Est au Sud-Ouest. Aujourd'hui, on ne peut tracer de limites. Beaucoup d'habitants des maisons à bon marché construites dans les paroisses rurales sont Anglais ou Irlandais. La population a été brassée.
Actuellement, Jersey dépend presque exclusivement de l'Angleterre pour sa culture: livres, revues, magazines, journaux, cinémas sont en anglais. Cette pénétration se manifeste dans l'anglicisation des noms de lieux et même de personnes. On ne parle plus de Hâvre Giffard, mais de Giffard Bay ; de la Corbière Point. La modification des noms de personnes n'affecte pas seulement leur prononciation mais leur orthographe : Loose pour Luce, Syvry pour Syvret, Major pour Mauger. Les prénoms ne sont plus les noms de Saints traditionnels, mais des Phyllis, Ivy, Shirley, Daphne, etc...
Il faut reconnaître toutefois que l'anglais ne s'est pas imposé avec la rapidité que présageait Inglis en 1838 : « La langue universellement employée est encore un dialecte barbare... Il n'est pas improbable que dans vingt ans l'anglais sera la langue de la législation, de la prédication, des habitants » (p. 72). Le français n'a donc pas disparu aussi rapidement que le pensent certains, même de nos jours, et il est probable qu'il persistera encore longtemps.
Beaucoup d'insulaires habitués aux deux langues de leur enfance emploient l'une ou l'autre indifféremment, et pensent aussi facilement en chacune d'elles. Mais il n'en est pas de même chez tous.
Ceux dont l'éducation a été moins poussée pensent d'abord en anglais et traduisent ensuite. Certaines tournures ou expressions les trahissent. Ils conservent l'adjectif avant le nom. Ils introduisent des mots anglais dont ils n'ont pas trouvé immédiatement l'équivalent ; « un tel est nice », pour gentil, « donner un lift » (faire monter quelqu'un dans la voiture). A table ils vous diront : « aidez-vous (help) vous-mêmes » pour « servez-vous », (écolages) de schoolage. Tournures passives que le français ne connaît pas « Il est supposé de faire ceci... », « avoir sa voiture graissée », « appliquer pour » (apply for), faire une demande. On pourrait relever maintes inscriptions manifestant les curieux effets du contact continuel de deux langues. Telle cette affiche : « Défense de trépasser sur ces premices. Les contrevenants seront prosécutés » pour : « Défense de passer sur cette propriété, les délinquants seront poursuivis ».
III. - Le Jersiais
Cherchez-vous une discussion interminable ? Lancez vos interlocuteurs anglais, français ou jersiais sur le problème des langues dans l'île. Vous ne trouverez pas témoignages aussi contradictoires sur aucun autre problème.
Les anglais méprisent volontiers le « jersiais », ce « dialecte barbare » que Plees décrivait en 1824: « un mélange hétérogène de vieux français, même d'expressions modernes et de mots anglais gallicisés si bien que l'on peut l'appeler une espèce de lingua franca » et il est prononcé, spécialement dans les districts de la campagne, avec le plus abominable « patois ». De plus les différentes paroisses ont des accents différents, si bien qu'il y a autant de dialectes dans la langue de Jersey que dans l'ancienne Grèce. Ce mélange est vraiment dommage pour l'île ».
Les Français ignorent souvent la langue jersiaise, qu'ils ne soupçonnent pas d'être une richesse nationale... Beaucoup d'observateurs superficiels ont tendance à la croire entièrement disparue parce qu'ils ne la reconnaissent même pas bien souvent quand on la parle.
Et les Jersiais ? Devant un étranger, les fermiers jersiais rougissent de leur dialecte. Mais, entre eux, aux champs, au marché, en famille, c'est toujours le jersiais qu'ils emploient. Si vous parlez anglais, on se méfie de vous. Si vous parlez bon français, vous êtes un " monsieur ". Quant à ce qu'on pourrait appeler l'élite intellectuelle jersiaise, elle s'efforce d'établir que le jersiais est un dialecte et non un " patois ", ce dernier terme impliquant une nuance de mépris.
Une certaine confusion de termes explique la divergence des jugements. On pourrait concéder à M. Plees l'existence à Jersey d'une quatrième langue, véritable patois tel qu'il le décrit et dont l'existence est déplorable. Mais ce n'est pas cela le jersiais, c'est ce qu'on appelle le "jersey french ".
1) Le jersiais présente toutes les caractérisques d'un dialecte et non celles d'un patois.
D'après M. Dauzat, un patois est un « idiome, langue on dialecte, socialement déchu en tant qu'il n'est pas parlé par l'élite intellectuelle et, subsidiairement, en tant qu'il n'a plus de littérature ». La distinction n'est pas d'ordre linguistique, mais social.
Or, nous l'avons déjà dit, l'élite intellectuelle de l'île met sa fierté à parler jersiais. Allez dans l'antichambre de la Cour, dans les salles paroissiales, et vous entendrez du "jersiais" authentique.
Si la littérature jersiaise n'a pas été abondante - le jersiais est plus homme d'action qu'intellectuel - loin d'être morte, elle connait de nos jours une renaissance. Elle a été illustrée par les noms de Robert Pipon Marett, Philippe Langlois, Augustus Aspley Le Gros, Matthieu Le Geyt, Henri Luce Manuel, Philippe Asplet, Edwin John Luce et d'autres. Il existe encore des écrivains qui composent de petites pièces de théâtre jouées avec un grand succès, des chansons et des articles de journaux.
Le dialecte jersiais existe, c'est un fait certain. Quel en sont les caractères principaux ?
2) Le dialecte de Jersey est un dialecte normand
Il est difficile de tracer les limites des dialectes normands. On peut cependant, dans l'ensemble, distinguer trois régions : Haute, Moyenne, Maritime Normandie. Cette dernière comprend le val de Saire, le Cotentin et la Hague.
On le dénomme souvent à tort - « dialecte anglo-normand ». Sans doute à cause de l'appellation « Iles anglo-normandes ».
Il n'a pourtant aucune relation avec le dialecte établi par les Normands en Angleterre au temps de la Conquête. Ce n'est pas non plus que l'isolement insulaire ait préservé le dialecte littéraire du Moyen-Age plus fidèlement que les dialectes du continent, car le dialecte a évolué dans les îles, mais avec une rigidité qu'il ne connut pas sur le continent où de nombreuses interférences amenèrent des irrégularités et des analogies.
Citons ce passage de la « Normandie inconnue » en substituant le mot " dialecte " à celui de " patois ". « Oh, vous tous, braves Jersiais... sachez-le, votre dialecte est vénérable, votre dialecte est sacré ; car c'est de votre dialecte qu'est sortie comme la fleur de la racine, la langue française... Le premier poète qui l'a parlé a été le premier des poètes français :
Je die dirai ke jo su!
Wace, de l'isle de Gersui ».
Cette enthousiaste envolée n'est pas rigoureusement exacte car la langue de Wace n'était pas le pur dialecte normand, mais un dialecte littéraire compris dans les milieux cultivés du Nord de la France. Victor Hugo a cependant joliment exprimé la noblesse de ce dialecte d'où sortit la langue française.
Le dialecte de Jersey présente les caractéristiques du dialecte normand d'après Joret :
1) conservation en é ou è de la diphtongue ei du Moyen-Age du latin e, i en position libre accentuée.
2) conservation du latin k devant a : par exemple : un "câteau ", " câtel " (château), "cao " (chaud) ;
3) modification de a en é devant r : "tcherrue " (charrue)
4) développement du latin k en ch devant e, i ;
5) conservation du suffixe el (latin ellu) en é au lieu de eau ;
6) traitement différent du latin e ouvert devant une palatale : nié (nuit) ;
7) possession des deux formes de l'article = i - (e) et la au lieu de sa réduction en un seul comme dans le Picard ;
8) traitement du e ouvert latin devant une palatale : " llié " (lit).
Le vocabulaire de Jersey n'est pas constitué de mots déformés d'une autre langue, mais a ses termes propres.
Citons-en quelques-uns seulement
- landreux, s. m. pour lourdaud
- lobre, s. m. pour fainéant ;
- fredas, s. m. bruit soudain, inattendu
- ouïcheba (t) s. m. capture d'oiseaux au moyen d'un filet tendu le long de la haie, la nuit.
III. - L'étude des dialectes de Jersey et de Guernesey est significative de l'évolution linguistique sous le fait de l'isolement. Les différences entre les deux Îles sont importantes. Non seulement les voyelles et les consonnes y sont traitées différemment : ainsi Jersey a " eu " comme en français (à part quelques exceptions dans l'Est où se développe une évolution secondaire). Guernesey ne l'a conservé que devant un r final. « A » en position accentuée est devenu e comme en français à Jersey, mais s'est diphtongué en ai à Guernesey, mais les vocabulaires eux-mêmes diffèrent et, chose curieuse, pour les termes les plus courants : à Jersey, on dit " eune beurrée " ; à Guernesey "eunne doraïe ". Un champ est "eun cllos " à Jersey, mais un " courtil " à Guernesey ; un peigne : démêle ou dêmêleur pour un " débouclieux " (Nord de Guernesey).
Les principales influences qui ont déterminé l'évolution du dialecte sont extérieures, française et bretonne. Nous en indiquerons seulement quelques exemples au passage.
Dès les origines de la séparation, Jersey ne fut pas culturellement isolée de la France. Les gens de loi et d'église allaient compléter leur instruction à Caen, bien avant la fondation d'une université dans cette ville. Le jersiais ne fut jamais employé comme langue légale, ni en chaire : il n'était même pas usité pour les prières en famille. L'influence française se retrouve dans certains mots plus abstraits. Ainsi, le latin i et e en position libre se sont diphtongués en ei, mais a Jersey n'a pas suivi l'évolution we, oi. Dans les îles, on dit : mé. A Jersey on a conserve le mot p'tun d'origine indienne pour tabac et on n'a pas adapté le mot courant en français. Un "mousse " (jeune garçon) doit venir de l'espagnol "mosse" : "guélesses " s. f. pl. pour bretelles est usité en Irlande.
L'apport breton doit être plus considérable qu'on ne pense. Ainsi "aller quedaine ", marcher à toute vitesse, vient du breton " gaden ", prononcé "queden " dans les Côtes-du-Nord (= lièvre). Le breton possède la même expression : filer comme des lièvres.
Malgré toutes ces influences, le jersiais conserve un teint archaïque. Quoi de plus joli, en effet, que " ahanner", "amender " (pour aller mieux), " mauve " pour mouette, " ain" pour abeille, disparus du français an XVIe et XVIIe siècles, " ménage " pour maison et, terres d'une ferme, " arsion " pour chaleur excessive, "se muchi " pour se cacher. Les diminutifs rappellent les poésies de Ronsard : cf. la chifournie (vieille).
« Je vos vignonerai
de petites sornettes
pilvaudant dans la boue ». (pataugeant)
et ces images délicieuses : "lé temps s'écoute "(quand le temps est calme) ; "la pomme meûsit " (pour une personne qui vieillit).
Le dialecte reste encore très vivace dans de nombreux proverbes dont nous parlerons à propos du folklore.
Le jersiais a passé par toutes les phases qui précèdent la disparition de toute vieille langue, décrites par Dauzat. L'indigène commence, tout d'abord, par comprendre la langue étrangère (l'anglais dans le cas), puis la génération suivante la parle, mais seulement aux étrangers. Enfin, les deux langues coexistent. C'est la période critique : les générations suivantes préféreront l'anglais et n'emploieront le jersiais qu'avec les anciens. Il est probable que dans cent ans, au plus, le jersiais aura disparu, même de la "vielle pâraisse de Saint Ou". Les enfants de bretons sont les premiers à l'oublier, à vouloir délibérément l'oublier. L'extinction du jersiais a encore été accentuée par l'exode en Angleterre de beaucoup d'enfants en 1940.
Les contaminations anglaises nombreuses font déchoir ce dialecte en véritable patois comme nous l'avons déjà signalé. Toutes les inventions modernes sont désignées par leur nom anglais ; une "bike " (bicyclette), un "wireless " (pour poste de T. S. F.). On dit : "c'est une nice hardelle " (gentille jeune fille) ; " faire de la mess " pour faire de la saleté. Des verbes anglais francisés sont souvent utilisés : " scrober" pour « laver le parquet à la brosse » ; " boster" pour " éclater". Un enfant nous disait un jour cette phrase typique : « quand j'aurons fini mon notebook, j'le robberons et j'starterons again » (quand j'aurai fini mon cahier, je le gommerai et je recommencerai). Cette difficulté de parler correctement aucune langue est grave et influe, sans nul doute, sur le développement mental.
Les parents sont généralement responsables de cet état de choses. Une maman dit à son garçon : « Dis au "headmaster" qué ta "mother" s'en va en ville faithe du " shopping " et qu'nou veurt t'acater un "summer suit " tandis que les " sales" (ventes) sont en allant ».
On encore : La "girlie " s'trebuque. Oulle a fait " tumble" et oulle a du "hurt ".
Les fermiers parlent anglais aux animaux qui ne les comprennent pas toujours. Au lieu de " Chadon ", "Choupi" ils disent "Come up", " Go on ". Les "Hu'ye, Ouogue (droite), Bidéouais" (gauche) sont remplacés par "Gee up". Le " tchule et értchule" classiques font place à " Back, you".
Il y a tout de même des jersiais qui s'indignent de ces manières. "Not' bouan vièr langage n'est pus fait servi comme aut'fais, spécialement d'la part des jeunes. II veulent tous d'viser en anglais " (Chroniques de Jersey). « Quand non pense, des "Cuckoo lane" et des " Airport Road" - tas d'niolin d'angliaïchinnie... vèthe, il est grand temps qué y ait tchiquechose de fait pour garder les viers noms, le vier langage et les vieilles couôtumes. Nou voudra-t-i pon les prêchains jours nos empêchi de pâler not' bouon vier lingo ? » (Chroniques du 27.VI.37).
Il est curieux de noter les différences de dialectes à l'intérieur de l'ile. La division que crée la ville se retrouve dans le domaine linguistique. Les parlers de l'Ouest représentent un système relativement tendu et les parler de l'Est un système très relâché avec les diphtongaisons marquées. Dans l'Ouest, on dit "pêtre" pour l'araignée et dans l'Est " irangnié ". Un gland est un "gliand " dans l'Est, mais une "tchênelle dans l'Ouest ; une fauvette d'hiver est un " mouosson à p'tit bé" dans l'Est et un " verdreu " dans l'Ouest. Il faudrait ajouter une troisième région, celle du centre (paroisse de Saint Jean). Il y a également des îlots qu'il faudrait expliquer ; par exemple : Anneport, où se parlait le dialecte dit du " Faldouet " (Saint Martin), la Moie (Saint Brélade), La Rocque (Grouville), Les Landes (Saint Ouen), Le Mont Mado (Saint Jean) (2).
(1) Selindgeuse, une ràclée, vient de sling.
(2) F. LE MAISTRE, The Jersey language in its present state. The passing of a norman heritage. Communication à la Société Jersiaise de Londres le 8 juillet 1947.
Pierre Dalido
1951
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