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Impromptu |
Oh! poète immortel! sous ton toit je me pâme, Rêvant sur ton pupître, assis dans ton fauteuil, Je sens ton souffle ardent s'infiltrer dans mon âme, Et m'inspirer d'amour pour ton antique seuil. Tu descends - je te vois - règne dans ton sanctuaire! Il est sacré pour nous, c'est le temple des dieux! C'est pour le troubadour le phare et la bannière, C'est le prisme étoilé d'où nous voyons les cieux! Ah! tout autour de nous, nous ravit, nous inspire, Tout est saint et sacré dans ce sublime autel! Ah! zéphyrs, soupirez. - Allons au grand empire, Mon âme, prends ton vol vers les monts immortels! Je suis extasié dans ta belle patrie!... Assis près des neuf soeurs, près du docte Apollon! Chantons! barde! chantons, sur ta lyre ravie! Fais vibrer ses cordons, dans ton sacré vallon! Oh! donnes-nous un trône en ton palais, Shakespeare, Nou y vivrons ensemble, oh! digne protecteur! Tout est musique et chants dans ton sublime empire! Tu m'y protégeras - dis, barde inspirateur? Oui - regarde là haut - ne vois-tu pas un trône Entouré d'immortels? Vois le rameau sacré, C'est au poète heureux qui ravit la couronne Que ce saint talisman doit être consacré. Pars, et tu reviendras au banc des immortelles!... Chantes encor là bas - dis ce que je t'appris, Tu recevras de moi de pures étincelles Pour inciter ta lyre à remporter le prix! Il faut donc que je parte... Oh! cruel ostracisme... Dis, Shakespeare, oh, réponds? - Oui, pars, pauvre exilé, Et vas dans ma chaumine, et aidé de mon prisme, Souvent tu me verras sur mon trône étoilé! Retournes vers l'Avon, vers ses nobles prairies! Dis-leur que j'adorai mon modeste hameau; Il est toujours l'objet des chants, des rêveries De ma lyre d'amour et de mon chalumeau! Barde, tu reviendras bientôt vers notre troupe, Tu vivras avec nous sous un ciel radieux! Hébé t'y nourrira du nectar de sa coupe, D'ambroisie et de miel qui font vivre les dieux! Sans adieu - je descends... je vais à ton pupître, Je vais à ton fauteuil... sur l'Avon enchanteur; J'y suis - salut, chaumière... ô salut, saint ministre, Je veux te dire un mot de notre grand chanteur! Il plane sur ces lieux, sur sa belle patrie, Où jadis il chanta ses premières amours! Il voltige sans cesse autour de sa prairie, Il chante son pays, et le chante toujours! Il aime son hameau, con comté, sa chaumière, Et sa noble Albion, ses princes, ses enfants, Il les inspire tous, cet ange tutélaire, Il prodigue sur eux ses bienfaits incessants. Oh! mortels, révérons son temple, sa mémoire; Son antique chaumine est un point glorieux, Est un vrai Mont Parnasse, un Mont Invocatoire Où nos enfants viendront pour invoquer les dieux! Oméga Sept. 29, 1861 |