A Saint Martin yavait naguèze
Un fin matouais, Thomas Le Geyt,
Et par san gardin de drièze,
Chacun passait et répassait.
Thomas trouvait la chose drôle,
Et dans un kminet a l'êcart,
Y bandit une saukétole;
Et la nommit: Une trape à bûzard.
Thomas allait bain souvent beze
Après l'Eglise, siès Sénué.
Et pâlant de chose et d'affeze
Y restait long-temps à topé.
Un sé qu'il eut fini sa goutte,
Y dit: j'men vais, car il est tard;
Et voulant raccourchi sa route,
Y fut sauté dans sa Trape a bûzard.
Fallait entendre Thomas brèze,
Et juzé ses ptits et ses grands.
Y heurlit assais haut pour fèze
Venin sa femme et ses êfants.
Y dizait; "qui terrible vanne!"
Sa femme l'y dit, grand bachouard,
Tu pensais bain d'avé du fanne
Mais te vla prins dans la trape à bûzard.
En Jèrri, j'ai veu bain du monde.
Depis chinquante-ans, hauts et bas
Petits et grands, tous à la ronde,
Feze chan que faisait Thomas.
S'ou lue devais la moindre somme,
Y lue faut jusqu'au dergni liard;
Y perdent la bête et la somme
Chonna s'appelle une trape à bûzard.
Créanciers de la Mercantile,
Dites mé, avoue bain pensait
Devant de vos êmoué la bile
A l'histoueze à Thomas Le Geyt!
Il est trejoue bon de s'entendre
Et que chacun cède sa part
Car, être prins quand nou crait prendr'
Chès bain vraiement une trape à bûzard.
Comme un renard guette une poule
Et veut l'obtenin à tout prix,
En Jèrri il est une foule
De gens, que j'avons veu petits,
Qui se sont grandis par la vice,
Et la fausseté du Renard.
Y crait tout Jèrriais un Amice;
Mais souvn'ous de la trape à bûzard.
L'Anmin Flippe
Chronique de Jersey 20/9/1873
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