Si Monsieur de Grouville
Voulait bien m'inspirer,
Quand il se rend en ville,
Il viendrait me parler.
C'est un "Singulier " homme,
Muni d'un clair cerveau ;
Et qui badine comme
S'il feignait le nigaud.
Il raisonne à sa guise,
Et s'exprime très-bien ;
Mais, de lui, quoiqu'on dise,
Il va toujours son train.
Souvent même, il badine
En discutant le droit ;
L'on croirait, à sa mine,
Qu'il réforme la loi.
Celle sur la milice
Lui semble un vrai fardeau
Soit raison, - soit caprice,
Il la croit un fléau.
En fait de politique,
Il n'a peur de personne
Et souvent, sa réplique
Surprend, et même étonne.
Quelques fois, aux Etats,
J'ai cru le voir sourire,
Dans d'importants débats,
Se retenir de rire.
Mais, s'il s'abstient de faire
Un discours vain ou long,
Il sait son bréviaire
Et sa besogne à fond.
Ce Monsieur de Grouville
Étant un érudit,
Médite, en homme habile,
Les choses qu'on lui dit.
Aux Etats, du Divorce,
Il soutint le projet;
Et j'apprends, qu'avec force,
Il déclara tout net:
" Le divorce rend libre
Les époux mécontents,
Et garde en équilibre
Les moeurs de notre temps.»
Il parle comme il pense,
Sans vouloir offenser.
Habile en sa défense,
Il aime à plaisanter.
Il est même agréable;
Sa "Singularité
Est-qu'il est très affable,
Franc et fort éclairé.
Clement Buesnel
|